Kratie. Notre prochaine étape, à 150 kilomètres de là. Dont la moitié de piste rouge au milieu de champs.
J’aime ça la couleur de cette terre !
Mais si ce n’est pas le sujet.
D’autres villages, d’autres paysages merveilleux, mais je ne vais pas vous embêter avec ça. Voilà des photos.
Et subitement quelque chose d’inhabituel dans notre quotidien va nous faire basculer dans l’horreur !
Faites sortir les mouflets, la suite est pour les bonshommes…
Plantons un peu le décor.
Nous roulons depuis une bonne grosse heure bien grasse, à un bon rythme de 50 km/h de moyenne. Et cela à son importance.
Le sourire aux lèvres et les yeux chamboulés par ce que vous venez de voir – notamment.
Nous nous trompons de chemin, mais fort heureusement les gens du village nous arrêtent. Par là c’est un cul-de-sac nous disent-ils.
Et nous remettent sur le droit chemin en me tapotant l’épaule d’une bonne claque amicale.
Qui m’a disloqué la clavicule.
Mais bon, reprenons notre chemin. Toujours souriants. Toujours le nez au vent. Toujours heureux…
Et c’est là que notre vie à basculé.
Il s’est passé quelque chose. D’apparence anodine.
Mais avec de lourdes conséquences.
Conjointement (peut-être parce que nous sommes mariés et passons nos journées ensembles (d’ailleurs on est réglés pareils maintenant, pratique : on est chiants en même temps)), nous voulons que cesse – temporairement bien sûr – cette routine de joie.
Car nous avons faim !
Et alors, malins comme des pangolins nous nous mettons en quête d’un aimable bouge qui saura nous sustenter.
Étonnamment cela s’avère plus compliqué que d’habitude. Des maisons partout, mais point de troquet en vue.
La panique nous gagne. Claire qui a faim est dangereuse comme une louve à qui l’on veut piquer ses petiots.
Quelques kilomètres, plusieurs fausses joies. Mais RIEN…
Enfin une lueur d’espoir. Des tables, des chaises en plastique. Des bouteilles d’eau et quelques autochtones mâles qui discutent à l’abri d’un auvent de bambou. L’oasis que nous cherchions ?
Minute goupillon !
C’est étrange : les chaises sont bizarrement revêtues d’un joli tissu. Les gens sont vêtus comme pour un évènement important. Etrange comme décorations dans la vie d’un village de paysans pauvres.
Devant ce présumé restau, flotte un drapeau blanc.
C’est louche. Mais affamés et courageux, nous présumons qu’il s’agit d’un lendemain de mariage. Ce qui expliquerait les jolies décorations et les habits élégants. Alors en désespoir de cause et avant que mon épouse n’ait fini d’avaler sa main gauche, nous allons nous enquérir de l’éventuelle possibilité de glaner quelque reste de la bombance passée.
Ce qui ne fut pas sans difficultés. Ah la barrière de la langue, connauds de Babel tiens !
Des sourires, des mains qui gigotent et nous voilà émerveillés assis à une table, de l’eau fraîche devant le nez, un saladier de riz, deux énormes bols de plats en sauce et un poisson grillé d’une livre !
Vive les mariés !
Et vivent leurs invités qui n’ont pas tout fini !
C’est une orgie culinaire qui commence parce qu’en plus c’est foutrement bon.
Un quinquagénaire bedonnant explique à Claire qu’il a fuit en Thaïlande pour échapper aux Khmers Rouge mais qu’il est revenu. C’est tout.
Et pendant ce temps un vieillard rigolard m’explique dans un mélange improbable de français (ou de ce qui y ressemble) d’anglais (ou approchant) et de Khmer qu’un de ses copains vieillard du village est mort. Son cadavre (comme il dit de sa voix rocailleuse) est là dans cette maison.
Et trop pauvre pour lui payer un enterrement ils ont organisé un dîner payant, où la famille et le village sont venus. Pour faire comme une cagnotte mortuaire.
Une sorte de coopérative solidaire de l’enterrement.
Que ça se passe presque tout le temps comme ça dans les villages de paysans pauvres.
Un peu gênés nous fûmes. Pas longtemps, les rires et les sourires sympas et protecteurs nous ont rassurés. Le repas fut excellent et sympathique. Nos plats à peine finis, un jeune homme nous rapporta du rabiot. Et pas possible de refuser.
Jusqu’à s’en éclater la panse.
Et encore de l’eau fraîche, parce qu’il fait chaud sous le soleil cambodgien.
Et quand nous avons voulu régler cette orgie il n’en fut pas question. « Oh non, non, je vous en prie ! » fut la réponse.
Merci les paysans pauvres.
Votre générosité nous à comblé.
Physiquement et spirituellement.
Et nous sommes repartis, en laissant bien sûr, notre participation à l’enterrement du copain vieillard.
Qu’il repose en paix, et que ses copains n’aient de cesse d’être rigolards.
Et après quelques kilomètres nous voilà à Kratie (qui se dit Kratchié en Khmer), pour déguster une bonne bière fraîche sur le bord du Mékong, notre nouvel ami.
Dans une petite bulle de bien-être.
Kratie, à cette particularité d’être situé dans une zone du Mekong où batifole une centaine de dauphins d’eau douce. Très menacés d’extinction, et certains de leurs membre ayant même décidé d’accélérer les choses récemment en faisant un suicide collectif.
Un mini temple du soleil à 17.
Bref on ne les a pas vus. Il parait que ce n’est pas facile d’avoir la chance de les observer, mais ils sont dans nos cœurs !
Alors on a bu des bières au bord de l’eau, mangé des sandwichs et des tranches de lard grillées. Et du riz cuit dans des bambous.
Et des saucisses qui on le goût des Würst’l teutonnes.
Et avons poursuivi notre remontée du fleuve Mékong, qui pour les anciens à bien changé. Plus de pluie de napalm et de torture dans la boue (rouge, celle qui est jolie).
Non maintenant c’est un havre de paix. Ou presque.
Nous roulons maintenant vers Stung Treng à encore 150 kilomètres de là.
Et après une halte près de rapides et quelques marins sportifs, dont la témérité s’approche de celle des pêcheurs à pied.
Nous découvrons une ville pleine de charme ancien.
Et une ville au ponton le plus fou que j’ai jamais croisé.
On a marché sur l’eau. Comme Jésus et sa meuf. Si il avait eu une officielle.
Ça c’était pour le fun, en vrai, il sert.
Notamment à rejoindre l’île en aval. (il s’avèrera que en fait non mais c’est pour une prochaine fois)
Mais pas que. Il sert aussi à venir nettoyer sa mob, se baigner, se laver, laver ses habits ou ses sacs de riz…
Et avouez qu’esthétiquement ça sort un chouïa de l’ordinaire.
Maintenant que nous sommes bien au nord, à quelques kilomètres au sud du Laos, et à l’ouest du Viêtnam, nous allons nous rafraichir. Peut-être.
A 220 kilomètres de là, Ban Lung nous attend, avec dans le regard plein de promesses.
Un lac dans un volcan éteint, des tribus primitives comme avant (mais avec un portable et des lunettes de soleil), quelques cascades et d’autres joie insoupçonnées.
La première est que la carte s’est bellement gourée, il n’y avait que 140 bornes, dont un bon gros tiers sans croiser âme qui vive. Un gros tiers inhabité.
La seconde est qu’étant en altitude, nous eûmes la joie d’entendre le ciel gronder en fin d’aprèm, et le déluge rafraîchir l’air en le rendant respirable.
La troisième est que nous avons, grâce à Run, un monsieur jovial faisant le pied de grue sur son scooter près du marché, trouvé une jolie chambre proprette, calme, et habitée par une jeune friponne orientale et fortement dénudée. A notre disposition deux brosses à dent et de l’eau (comme dans toutes les chambre d’hôtel, guesthouses ou assimilé, mais j’avais omis de vous en parler. Voilà c’est réparé).
Et tout cela pour un prix frôlant l’indécence.
4 dollars la nuit. Pour ceux qui ne savent pas ce que ça représente, c’est moins de 3€50. Voilà, record battu !
Il est trop tôt pour vous parler du reste, je garde ça pour une prochaine aventure.
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