Et là, c’est le drame. Tout s’enchaîne.

Notre halte à Tbeang Meanchey (Aurel et moi ne sommes pas d’accord sur la prononciation de cette ville) ne devait être qu’une étape, pour repartir le lendemain à Kampung Thom.

Mais l’envie de flâner, de découvrir cette campagne verdoyante et le fait de se retrouver dans une si jolie Guest house fut plus forte que la raison.

Si seulement nous avions écouté notre raison…

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N’ayant aucune conscience des évènements qui allaient survenir et changer radicalement notre façon de voyager, nous nous installons donc le premier soir pour boire une bière dans un boui-boui et regarder les gens vivre, passer sur leur mob à 4, 5, parfois 6 lorsqu’ils ont beaucoup d’enfants, les femmes toute vêtues de leur habit khmer favori (le pyjama bleu avec des nounours et des nuages), les hommes vêtus du leur (chemise propre et pantalon à pinces. Allez savoir pourquoi il y a autant d’enfants dans tous les coins si les femmes se laissent aller de la sorte…)

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Le soleil se couche et les lourds nuages annonciateurs de mousson reflètent les derniers rayons roses, oranges, rouges du soleil.

La chaleur diminue. La première étoile apparait.

Les stands ambulants ouvrent peu à peu et les clients commandent et emportent leur pitance du soir sans descendre de leur mob (Mac Do n’a rien inventé en matière de Drive In).

D’autres vont manger dans un restaurant de rue où des marmites trônent sur une table. Pour savoir ce que l’on va manger ce soir, on soulève les couvercles qui dévoilent leurs surprises gustatives.

Une sauce très orangée dans laquelle un poulet semble s’être noyé. Une soupe de tripes de cochon. Un mélange de lard et de lamelles de gingembre. Une salade de bambou. D’autres plats non identifiables, même après plusieurs semaines passées dans ce pays. Une fois qu’on a choisi, on va s’asseoir à l’une des quatre tables disposées sur le trottoir, sous un arbre.

Une petite fille vous apporte un grand verre rempli de glaçons. Au centre de la table sont disposées toutes sortes de sauces, des pimentées sévères, des pimentées légères, du sucre, du vinaigre, de la sauce cacahuète, de la sauce soja… Et une théière. Ici, à la place de la carafe d’eau, vous avez du thé : Cela permet d’utiliser l’eau du robinet, de la faire bouillir durant 5 minutes, et puis quitte à ce qu’elle boue, autant y glisser des feuilles de thé.

Plus la lumière décline, plus les Khmers s’affairent à se sustenter.

Les enfants jouent avec leur vélo sur le bord de la route, un enfant de 3 ans s’entraine à faire des roues arrières, une petite fille de 4 ans s’amuse à transporter son cousin sur son porte bagage, il doit bien avoir le double de son âge.

Un jour, ils en rêvent certainement la nuit, ils auront à leur tour leur mob. Peut-être pas une Honda Dream 125, ça coûte dans les 2000$, mais au moins une Daelim 50cc ou quelque chose comme ça. Et la petite fille montera en amazone derrière son cousin, parce que c’est quand même plus pratique pour descendre.

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Voilà dans quelle ambiance nous nous trouvons depuis presque trois semaines.

Dans une sorte de coton apaisant comme des chatons de deux semaines qui auraient été abandonnés et qu’une âme charitable aurait installé pour qu’ils se sentent mieux.

Une atmosphère sereine et saine, entourés de gens simplement gentils, qui vivent sans se plaindre de ce qu’ils n’ont pas et sans se vanter de ce qu’ils ont. Où les enfants sont aimés par leurs parents, leurs oncles, leurs tantes, leurs cousins et cousines, leurs voisins, leurs frères et sœurs, sans pour autant devenir des enfants rois.

Un endroit où l’amour de l’autre a une place de choix alors que 30 ans plus tôt, la haine ou la peur du semblable tuait 2 millions de personnes. Et nous sommes assis à notre table sur le trottoir de cette avenue, assistant à ce spectacle qui a disparu des rues Françaises, où qu’elles soient. Difficile d’y croire si on ne l’a pas vécu.

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Mais notre destin devait nous emporter vers une fin plus tragique et inéluctable que de boire trois bières à la terrasse de ce boui-boui. C’est pourquoi la soirée se passa sans embûches et nous conforta dans l’idée que ce pays a quelque chose que les autres que nous avons visités n’ont pas.

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Le lendemain, ne se doutant pas une seconde de la suite funeste de nos aventures, nous partons, naïfs, se promener dans les rues de la ville et dans la campagne environnante.

Nous dénichons au marché ce que nous cherchons depuis quelques jours : Un Krama, morceau d’étoffe aux motifs carrés, de plusieurs couleurs différentes.

Moment Culture: Un Krama sert à tout et n’importe quoi : C’est à la fois une écharpe, un chapeau, une jupe (pour les hommes principalement), un protège selle lorsque ta mob est garée au soleil, un porte bébé, une serviette pour s’essuyer sa sueur, un cache nez pour se protéger de la poussière lorsque tu conduis et je ne dois pas connaître encore toutes ses fonctionnalités.  T

oujours est-il que j’ai une allergie au soleil sur le cou qui fait de moi un crocodile, qu’il me faut donc quelque chose pour me protéger, et qu’Aurel veut tout le temps faire comme moi. Nous trouvons notre bonheur.

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Puis, envieux de la vie de ces Cambodgiens, nous investissons dans des hamacs.

En effet, il est fréquent de voir un cambodgien s’arrêter sur le bord de la route, sortir son hamac, l’accrocher et taper sa sieste durant quelques minutes.

Reposé, il repart de plus belle.

Donc, il nous en faut un. Mission accomplie.

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Le reste de la journée nous rapproche un peu plus de la tragédie à venir. Mais comment savoir que nous ferions un faux pas qui bouleverserait notre avenir ? C’est donc insouciants que nous tournons les scènes de notre film sponsorisé sur le Cambodge.

Puis nous rentrons à la Guesthouse.

Et là, l’horreur se produisit.

Ce fut dans le hall d’entrée. Je m’apprête à monter les marches de l’escalier lorsque Aurel me demande :

– Tu as les clés de la chambre ?

Je baisse les yeux sur mes vêtements. Je n’ai qu’une robe bleue, sans poches.

– Non.

Aurel farfouille dans ses dizaines ne poches, impossible de mettre la main sur la clé de la chambre.

Nous voici à la porte de chez nous.

Elle doit être restée dans la chambre. C’est impossible qu’il en soit autrement, elle DOIT être dans la chambre.

La gentille réceptionniste nous donne un double des clés.

La clé n’est pas dans la chambre.

Hurlements, cris d’hystérie, larmes de lamentations, rien n’y fait : Aurel a perdu la clé (sécurisée) de notre chambre, ainsi que la carte magnétique qui permet d’obtenir l’électricité.

Cela nous coûta une demie journée de voyage en plus.

Depuis, nous ne sortons jamais de notre hôtel sans déposer la clé à l’accueil.

Plus jamais.

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